L'importance du dessin chez nous

J'ai déjà parlé un peu du dessin qui occupe une grande partie de nos journées. Nous l'utilisons beaucoup pour les apprentissages.
Le dessin fait partie de la famille ça doit être dans les gènes ;-) Mon grand-père maternel était artiste peintre, j'ai une sœur artiste, une autre illustratrice. Le dessin était, pour mes sœurs et moi, une activité très pratiquée lorsque nous étions enfants.
Aujourd'hui je prends beaucoup de plaisir à voir mes filles dessiner et y trouver autant d'intérêt. C'est donc naturellement que je les ai encouragé à utiliser le dessin pour fixer les apprentissages....

Récemment, j'ai relu un passage de Maria Montessori sur le dessin, que j'avais oublié. Elle amène une idée intéressante, que je n'avais jamais reliée à notre vécu : lorsque l'enfant est impliqué dans une activité de dessin telle que du coloriage, la copie d'une forme géométrique, ou l'utilisation des formes à dessins pour créer des motifs, son intelligence n'est pas mobilisée entièrement et reste éveillée et réceptive pour écouter une lecture.

Le dessin occupe l’enfant pendant des heures et des heures, de sorte que nous employons ce temps pour les lectures, et presque toute l’histoire est apprise durant ce reposant travail de copie ou de simples décorations, si favorable à la concentration de la pensée.
Le dessin de copie ou le dessin décoratif inspiré directement des choses vues, les choix des couleurs, l’action de tailler un crayon, de préparer une feuille de papier... tout cela est un travail complexe de patience et d’exactitude, mais qui ne réclame pas une grande concentration intellectuelle ; c’est plus un travail d’application que d’inspiration, où la faculté d’observation de chaque détail en vue d’une reproduction exacte, ordonne et repose l’esprit plutôt qu’il ne le met en mouvement par un travail d’association et de création. [...] Les enfants prennent un intérêt profond à la lecture ; chacun s’occupe en même temps de son dessin et des faits qu’il entend. Il semble généralement qu’ils trouvent dans une occupation l’énergie pour perfectionner l’autre. L’attention donnée mécaniquement au dessin empêche l’esprit de se perdre dans la rêverie et le rend capable d’absorber complètement la lecture.

En relisant ceci, j'ai pensé à Liv qui souvent se met à faire quelque chose quand je lui lis un livre, allant même jusqu'à en feuilleter un autre ! Elle fait ça depuis toute petite. J'ai plusieurs fois pensé que cela lui était propre et qu'elle avait besoin de mobiliser son intelligence d'une autre façon pour rester concentrée sur la lecture qu'elle entend. Mais je n'ai jamais pensé à lui faire la lecture lorsqu'elle passe des heures à dessiner !
Comme le dessin occupe les filles une grande partie de leur temps, je vais dorénavant, de temps à autre, leur lire un livre. Je choisirai des livres racontant des histoires vécues, afin d'apporter par cette occasion des faits historiques. Elle sont friandes d'histoires vraies et notre boulimie d'histoires vraies a commencé avec La petite maison dans la prairie (je parlerai des livres tout bientôt, j'ai un billet qui attend !).

Mais revenons au dessin...
J'aime beaucoup les mots de Maria Montessori et sa vision du dessin comme moyen d'expression au même titre que le langage, car c'est bien ce qui se produit chez nous, où toutes les idées cherchent à s'exprimer dans le dessin.

Le vrai maître de dessin est la vie intérieure qui se développe, s’affine et cherche ensuite, irrésistiblement, à naître et à s’extérioriser par une œuvre. [...] On commence à avoir le dessin libre quand on a un enfant libre.

 En dehors du dessin libre, du coloriage ou du dessin d'observation, j'encourage les filles à dessiner dans leur cahier pour mémoriser ce qu'elles ont appris. Le dessin est un processus lent qui permet à la pensée de se construire et de s'installer.
Après avoir choisi un sujet, nous faisons des recherches (dans les livres, l'encyclopédie, sur internet...) et je leur lis des passages, en allant du plus général au plus spécialisé. Nous discutons en fonction de leurs interrogations et de ce qu'elles aimeraient savoir. Parfois c'est un point précis qui les intéresse, d'autre fois, juste le sujet dans sa globalité. Après cette étape, les filles choisissent ce qu'elles souhaitent retranscrire dans leur cahier pour garder une trace et mémoriser. Elles dessinent ce qu'elles ont envie en rapport avec le sujet et écrivent quelques lignes. Liv écrit seule, je l'aide pour l'orthographe (qui a une très grande importance pour elle, elle ne veut pas faire de fautes). Je lui pose des questions pour la guider si elle n'arrive pas à savoir quoi écrire.
Émy, elle, écrit quelques mots, puis elle me dicte ce qu'elle a retenu et souhaite faire figurer dans son cahier.

Les dessins de Liv


De cette manière, les filles lisent, écrivent et travaillent sur un sujet qui les intéresse. Liv apprend à synthétiser une information pour en faire ressortir ce qui est important, à structurer le texte et à orthographier les mots. Émy est encore trop petite pour ce travail. Lorsqu'elle me dicte son texte, ce sont souvent des petits détails qui l'ont marqué qui ressortent !
Pour Liv, l'étape du dessin lui demande de sortir de ses habitudes. Elle ne dessine habituellement que des personnages, féminin en grande partie, qu'elle ne copie pas. Ils lui viennent tous de son imaginaire, inspiré par ce qu'elle lit, voit et vit. Copier un animal, un paysage, un objet lui demande plus de concentration et d'application. Elle doit trouver d'autres chemins et quitter ses automatismes. Elle doit être dans l'observation dans un but de reproduction. Ce n'est plus du dessin libre, mais c'est aussi intéressant ; lorsqu'on dessine un éléphant en cherchant à le reproduire le plus réellement possible, on est obligé de regarder en détail les différentes parties de l'éléphant, en même temps que sa silhouette et son allure générale. On va voir l'emplacement des défenses, la longueur de la trompe, la taille des oreilles par rapport au reste du corps, les petits plis de la peau, plus présents à certains endroits, les ongles sur les pattes... Après cet exercice, la connaissance de l'éléphant s'en trouve grandie et renforcée.
Émy est moins assurée pour recopier quelque chose et me demande parfois de lui faire la silhouette très légère au crayon pour s'en servir de guide. Cela l'aide bien et lui permet de progresser sans se sentir frustrée.

Les dessins d'Émy


J'aimerais que le dessin devienne le complément naturel de nos observations et de notre travail de recherche. Heureusement, les filles apprécient cette manière de travailler, ça leur vient tout naturellement. Liv ces derniers jours a fait de grands progrès pour copier un animal ou un personnage. Hier, elle a dessiné Jeanne d'Arc sur son cheval, je suis impressionnée !!